Editorial J85

Editorial

 

Mes Amies, mes Amis,

Aujourd’hui, mon adresse est plurielle. Ce n’est pas, en effet, à chacun d’entre vous que je voudrais parler mais bien vous inviter à me rejoindre dans mes réflexions ; peut-être, tous ensemble trouverons-nous une explication, voire une solution à la gêne qu’il m’arrive de ressentir.

Comme la plupart d’entre nous, je suis né dans un petit pays où il faisait bon vivre. A l’école, on m’a appris qu’il s’agissait de mon pays et qu’aimer son pays, c’était être patriote.

On m’a appris que si quelqu’un l’attaquait, je devrais défendre ma patrie et que c’était un honneur que d’être soldat de réserve tant que mon âge me le permettrait.

Et puis, la petite vie calme et paisible de mon enfance, les petites habitudes, les petites coutumes auxquelles je tenais tant parce que c’était les nôtres et qu’elles constituaient l’ossature parfaite de la micro société dans laquelle nous avions envie de rester ; Tout ce beau canevas dans lequel nous avions brodé notre vie me semblait menacé ; Oh ! Pas de manière brutale et violemment dévastatrice mais par ces arrivées dans mon pays de toutes ces personnes qui n’avaient pas le même langage, les mêmes coutumes, les mêmes convictions religieuses ou laïques.

Si je vous confie tout cela mes amis, c’est parce que, comme beaucoup d’entre vous sans doute, l’imposture que je ressentais clairement face à ces afflux s’est transformée en questionnement : Avais-je une raison objective de venir au monde ici plutôt qu’ailleurs… ?  J’étais là par hasard … Oui… Mais … mes parents y habitaient déjà avant moi… ! Mais eux aussi étaient tombés là par … hasard. Dès lors en vertu de quel grand principe étais-je en droit d’affirmer que ce… petit lopin (30000 kilomètres carrés… que c’est modeste !) n’appartient qu’à notre petite communauté ?

Les valeurs auxquelles j’ai voué ma vie de citoyen me donnaient mauvaise conscience.

C’est difficile, c’est vrai. On se sent un peu bousculé et même agressé.

Pourtant un élément nous rassemble : nous sommes toutes et tous autant que nous sommes, des homo-sapiens qui au terme d’une épopée de quelques millions d’années d’évolution,  vont se retrouver dans peu de temps sans doute face à une intelligence artificielle qu’ils auront créée eux-mêmes, après laquelle nous courons (consciemment ou non) alors que nous devinons quelle finira par nous submerger

N’y aurait-il pas là un énorme paradoxe ?

Soyons vigilants mes Amis, être laïques c’est aussi s’ouvrir et projeter un peu plus loin que le clocher de l’église.

Merci de m’avoir lu.

                            Francis